Qu’est-ce que le bio?
L’agriculture biologique est le seul type d’agriculture qui repose sur un ensemble de principes mettant la nature au premier plan. Ces principes sont inscrits dans des normes élaborées par l’industrie, approuvées par les consommateurs et vérifiées chaque année par des organismes de certification accrédités. Depuis 2009, les Normes canadiennes sur la culture biologique sont appuyées par une réglementation et une surveillance gouvernementales.
Comme l’indiquent les Normes canadiennes sur la culture biologique, Principes généraux et normes de gestion (CAN/CGSB-32.310), « La culture biologique est un système holistique conçu pour optimiser la productivité et la capacité des diverses communautés de l’agroécosystème, y compris la faune des sols, les plantes, le bétail et les personnes. L’objectif principal de la production biologique est de développer une production durable et en harmonie avec l’environnement ».
Lorsque vous voyez le logo « Canada Organic » sur un aliment ou une boisson, vous devriez vous sentir à l’aise de savoir que l’aliment a été cultivé et transformé de manière à respecter nos normes biologiques canadiennes rigoureuses, qui sont basées sur les principes de l’agriculture biologique.
Ces principes comprennent
Dans l’esprit de ces principes, les normes canadiennes sur la culture biologique imposent des limites et des interdictions strictes quant à l’utilisation des produits suivants:
- Pesticides persistants;
- Engrais synthétiques à base de macronutriments;
- Utilisation courante de médicaments, d’antibiotiques ou d’hormones de synthèse;
- Clonage animal;
- Génie génétique (OGM);
- Boues d’épuration (biosolides); Irradiation;
- Colorants alimentaires, arômes et édulcorants artificiels, agents de conservation, et de nombreux autres auxiliaires de production et ingrédients artificiels des aliments transformés. [2]
L’agriculture biologique est souvent définie par ce que les agriculteurs bio ne font pas. Mais il est tout aussi important de se pencher sur ce que les agriculteurs bio font, car leur objectif est d’obtenir des cultures et d’élever du bétail de façon « durable et en harmonie avec l’environnement »[1].
Fournir un habitat pour la biologie du sol en ajoutant de la matière organique et en faisant la rotation des cultures. Les agriculteurs bio peuvent protéger la biodynamie en évitant le travail excessif des sols et le compactage, ainsi qu’en évitant les engrais et les pesticides qui nuisent à la faune des sols.[2]
Enrichir les sols en ajoutant de la matière organique et en cultivant des légumineuses, de la luzerne et du trèfle pour fixer l’azote présent dans l’air et le rendre biodisponible pour les cultures. Le compost, les résidus de culture et les poudres de roche sont transformés par les microorganismes du sol en éléments nutritifs biodisponibles pour les plantes.
Opter pour la rotation des cultures, plutôt que de faire pousser la même culture (monoculture) année après année. Les agriculteurs bio planifient leur rotation des cultures de façon à empêcher d’attirer les parasites et de perturber le cycle de vie des mauvaises herbes, ainsi qu’à protéger les sols et à faire un usage efficace des nutriments.
Protéger la biodiversité en laissant des zones sauvages, en faisant la rotation des cultures et en évitant les pesticides persistants. Comparées aux exploitations qui n’intègrent pas de pratiques bio, les fermes de culture biologique ont généralement une meilleure biodiversité d’oiseaux, d’insectes et de pollinisateurs.[3]
Notes de bas de page:
[1] Systèmes de production biologique : principes généraux et normes de gestion. CAN/CGSB-32.310-2015. Introduction. I. Description
[2] https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4284392/ [en anglais seulement]
[3] Tuck, Sean L, Camilla Winqvist, Flávia Mota, Johan Ahnström, Lindsay A. Turnbull et Janne Bengtsson. 2014. Land-use intensity and the effects of organic farming on biodiversity: a hierarchical meta-analysis. Journal of Applied Ecology. 51(3): 746-755.[en anglais seulement]
Un écosystème agricole sain est constitué de nombreuses formes de vie. Les insectes, champignons et bactéries sont des « organismes utiles » parce qu’ils aident les cultures en pollinisant les plantes, en fournissant des nutriments et en s’attaquant aux insectes nuisibles. Les plantes qui entrent en concurrence avec les cultures sont considérées comme des mauvaises herbes. Certains insectes et maladies sont considérés comme des parasites, car ils peuvent nuire aux cultures. La clé de la lutte contre les parasites et les mauvaises herbes en culture biologique est de réduire leur impact.
Par quoi les agriculteurs bio remplacent-ils les herbicides, les engrais et les insecticides couramment utilisés en agriculture? La réponse est compliquée. En culture biologique, les agriculteurs ne se contentent pas d’utiliser les alternatives écologiques aux produits chimiques – ils travaillent avec la nature pour fournir les nutriments et lutter contre les parasites. Dans le choix des dates pour semer, du taux de semis et des variétés de culture, les agriculteurs bio réfléchissent à ce qui permettra le mieux d’éviter les problèmes de parasites et de mauvaises herbes.
Pratiques courantes dans les exploitations agricoles de culture biologique pour prévenir et contrôler les parasites, les mauvaises herbes et les maladies :
- La rotation des cultures perturbe le cycle de vie des parasites. Les parasites et les mauvaises herbes se développent lorsqu’une même culture est replantée année après année. La rotation des cultures corrige cela. Par exemple, le coléoptère parasite de la pomme de terre agonise lorsqu’il sort de son hibernation pour se retrouver dans un champ de blé.
- Maintenir une grande biodiversité crée un habitat pour les oiseaux et les invertébrés qui s’attaquent aux parasites.[1], [2] La biodiversité (les diverses formes de vie) peut être améliorée (i) en faisant pousser de nombreux types de cultures dans une ferme ou même dans un champ, (ii) en laissant des haies ou des prairies sauvages, et (iii) en ne pulvérisant pas de pesticides.
- La culture intercalaire, c’est-à-dire la plantation conjointe de deux ou plusieurs cultures, empêche les insectes nuisibles de trouver les plantes. Par exemple, alterner des rangées d’oignons et de carottes réduit les dégâts causés par la mouche de la carotte, qui repère les carottes à l’odeur.[3]
- La plantation stratégique tient compte du cycle de vie des parasites pour décider du meilleur moment pour semer et récolter.[4] Souvent, les agriculteurs bio plantent tard pour éviter la première poussée de mauvaises herbes et la première génération de parasites. Ils emploient un taux élevé de semis parce que les plantations denses laissent moins de place aux mauvaises herbes.
- La culture de couverture et les cultures non récoltées sont cultivées uniquement pour le bénéfice de la ferme. Elles font concurrence aux mauvaises herbes et fournissent un habitat aux organismes utiles qui s’attaquent aux parasites.
- Choix de variétés éprouvées ou conçues pour un usage en culture bio; elles peuvent être plus résistantes aux parasites et mieux à même de concurrencer la mauvaise herbe.
- Labourer pour déraciner la mauvaise herbe; les agriculteurs bio travaillent le sol lorsque nécessaire, mais se concentrent surtout sur la prévention des mauvaises herbes.
- Le traitement par brûlage tue la mauvaise herbe courte avec la flamme d’un chalumeau au propane (monté sur un tracteur ou sur un sac à dos).[5]
- Le désherbage à la main et le binage sont les plus utilisés dans les jardins maraîchers.
- Le paillage couvre le sol dénudé (par exemple avec de la paille ou une culture de couverture)
- Les alliés naturels. Les plantes, insectes et autres organismes aident les agriculteurs bio à lutter contre les parasites. Par exemple, une culture d’ivraie en couverture peut étouffer la mauvaise herbe et la mouche tachinaire peut parasiter le vers du chou. Les organismes utiles sont des créatures qui jouent un rôle bénéfique en pollinisant les plantes ou en s’attaquant aux insectes nuisibles. Pour attirer ces organismes utiles, les agriculteurs peuvent créer un habitat propice en semant leurs plantes préférées, en encourageant les fleurs sauvages ou en augmentant la biodiversité en général.
Lorsque le contrôle manuel et la prévention ne suffisent pas:
Les agriculteurs consultent les listes des substances permises par les Normes canadiennes sur la culture biologique. Pour déterminer quelles sont les substances permises, des examens rigoureux sont faits pour évaluer des conséquences aussi importantes que l’impact environnemental de la fabrication et de l’élimination d’une substance.[6]
Les agriculteurs bio doivent élaborer un plan de prévention des parasites. Ce plan peut comprendre la rotation des cultures, les cultures de couverture ou le compagnonnage. Si un problème de parasites survient malgré les mesures préventives, les agriculteurs peuvent utiliser des substances qui ont fait l’objet d’un examen rigoureux de « l’impact social et écologique de la production et de l’application de la substance »[7].
Exemples de substances permises:
- Bacillus thuringiensis (BT): bactérie du sol qui tue certains parasites à corps mou.
- Bentonite, kaolin: argile appliquée sur les feuilles pour décourager les insectes nuisibles.
- Terre de diatomées (TD): diatomées fossilisées (algues à coquille dure) qui abîment le corps de certains insectes, causant la déshydratation.
- Les huiles de dormance: agissent en enduisant le tube respiratoire de certains insectes ou en endommageant leur paroi cellulaire.
- Les couvertures flottantes (tissu léger): empêchent les parasites de se poser sur les plantes.
- Pièges à phéromones: attirent et piègent les insectes nuisibles avec des phéromones (substance chimique libérée par les insectes) ou empêchent leur accouplement.
- Pyrèthre: pesticide botanique dérivé du chrysanthème.
- Savon: endommage la paroi cellulaire ou asphyxie certains parasites.
- Spinosad: extrait de bactéries telluriques qui tue certains parasites.
Notes de bas de page:
[1] Marshall, Edward & K Brown, V & Boatman, Nigel & J W Lutman, P & R Squire, G & K Ward, L. 2003. The role of weeds in supporting biological diversity within crop fields. Weed Research. 43. 77 – 89. [en anglais seulement]
[2] Reddy P.P. 2017. Weed Manipulation. In: Agro-ecological Approaches to Pest Management for Sustainable Agriculture. Springer, Singapour [en anglais seulement]
[3] Uvah, I. I. I. and TH Coaker. 1984. Effect of mixed cropping on some insect pests of carrots and onions. Entomologia Experimentalis et Applicata. Vol 36. Issue 2. pp 159- 167 [en anglais seulement]
[4] link.springer.com/article/10.1007%2Fs13593-011-0009-1 [en anglais seulement]
[5] www.dal.ca/faculty/agriculture/oacc/en-home/resources/pest-management/weed-management/flame-and-steam-weeding.html [en anglais seulement]
6] Systèmes de production biologique – Principes généraux et normes de gestion. CAN/CGSB-32.310-2015. 10.3: Tableau 8 − Critères d’examen des substances permises pour la production végétale
7]Systèmes de production biologique – Principes généraux et normes de gestion. CAN/CGSB-32.310-2015. 10.2.2 Examens des substances
Les agriculteurs bio fournissent aux animaux de l’air frais, du soleil et un accès à l’extérieur lorsque les conditions météorologiques le permettent. « Les animaux disposent de conditions de vie et d’un espace adaptés à leurs besoins comportementaux et une alimentation biologique. Ces pratiques visent à réduire le stress, à promouvoir la santé et à prévenir les maladies. »[1]
Les Normes canadiennes sur la culture biologique imposent des exigences strictes quant au bien-être des animaux, y compris des limites de densité. Par exemple, la volaille ne peut pas être gardée dans des cages en rangées ou en batterie; les agriculteurs doivent plutôt fournir »des conditions de vie qui tiennent compte de la santé et du comportement naturel de la volaille », y compris « le libre accès aux pâturages, à l’air libre et à des zones d’exercice, sous réserve des conditions météorologiques et du sol »[2].
L’utilisation d’hormones et d’antibiotiques en prophylaxie pour favoriser la croissance est interdite, mais « le traitement médical ne doit pas être refusé aux animaux malades ou blessés afin de préserver leur statut biologique. [3] Si les méthodes d’agriculture biologique ne sont pas efficaces, une médication appropriée doit être employée pour rétablir l’état de santé ». Si des antibiotiques sont utilisés, la viande de l’animal sera vendue sans certification biologique. Le lait de l’animal peut être considéré comme biologique après un délai déterminé.
Notes de bas de page:
[1] Systèmes de production biologique – Principes généraux et normes de gestion. CAN/CGSB-32.310-2015. III. Pratiques de la production biologique. 6.13 Exigences supplémentaires pour l’élevage de volaille: 6.13.1
2] Systèmes de production biologique – Principes généraux et normes de gestion. CAN/CGSB-32.310-2015.
3]Systèmes de production biologique – Principes généraux et normes de gestion. CAN/CGSB-32.310-2015.6.6.6
« Nourrir le sol avant la plante » est le mantra de l’agriculteur bio, car celui-ci travaille à créer des sols fertiles, riches en matière organique et grouillants de vie. Les plantes absorbent les nutriments de la matière organique en se décomposant. Le but est d’avoir des nutriments disponibles au rythme et au moment où les plantes en ont besoin. « La fertilité des sols se maintient et s’améliore en favorisant une activité biologique optimale dans les sols et une meilleure conservation des ressources »[1].
Pratiques de gestion biologique des sols
- Ajouter de la matière organique nourrit les sols en nutriments et améliore leur structure. La matière organique aide les particules du sol à s’agglutiner, ce qui réduit la perte de couche arable par l’érosion et crée des canaux qui améliorent à la fois la circulation et la rétention de l’air et de l’eau.[2] La matière organique fournit aussi un habitat pour l’activité biologique du sol, qui joue un rôle vital dans toute exploitation agricole de culture biologique.
- Cultiver des plantes de couverture pour améliorer la fertilité des sols. Ces plantes ne sont pas récoltées, mais sont cultivées pour améliorer les sols. Les cultures de couverture de légumineuses (engrais verts) fixent l’azote de l’air. D’autres plantes de couverture ajoutent de la matière organique, absorbent les nutriments solubles (pour réduire le lessivage des nutriments) ou réduisent l’érosion des sols.
- Couvrir le sol de cultures, de plantes de couverture, de chaume ou de paillis protège la couche arable, qui est le fondement de la santé du sol. La couche arable contient plus de nutriments et de biodiversité que le reste du sol. Les agriculteurs essaient de garder le sol couvert autant que possible, car les sols dénudés sont vulnérables à l’érosion par le vent et la pluie.
- La rotation des cultures, selon une séquence bien calculée, permet de garder le sol couvert, d’ajouter de la matière organique et de conserver les nutriments. Les cultures qui fournissent de l’azote (comme les légumineuses) sont suivies par des plantes qui absorbent beaucoup d’azote. Les agriculteurs bio font souvent des cultures intercalaires, c’est-à-dire qu’ils plantent deux cultures ensemble (ou une culture et une culture de couverture) pour mieux utiliser les éléments nutritifs du sol et couvrir le sol.
- Labourer léger réduit le risque de causer des dommages à la vie et à la structure du sol. Labourer léger permet aussi d’incorporer des engrais verts, de préparer le sol pour semer et de lutter contre la mauvaise herbe.
Amendements courants
- Le compost enrichit le sol de nutriments, stimule l’activité biologique et ajoute de la matière organique. Pour être certifié bio, le compost qui contient des déchets animaux doit atteindre au moins 55°C pendant quatre jours consécutifs[3] ; la température élevée tue les agents pathogènes et les graines de mauvaise herbe.
- Le fumier est généralement composté avant d’être épandu. S’il ne l’est pas, il faut l’incorporer dans le sol au moins 90 jours avant toute récolte vivrière dont les parties comestibles n’entrent pas en contact avec le sol (ou 120 jours si elles entrent en contact avec le sol).[4]
- Les poudres de roche, comme la chaux, ajoutent des minéraux.
L’agriculture biologique est un travail d’équipe
En visitant une ferme de culture biologique, vous verrez bien sûr l’agriculteur sur son tracteur et des gens qui désherbent, mais vous ne verrez pas la majorité de la main-d’œuvre.
En effet, la plus grosse partie du travail dans une ferme de culture biologique se fait sous nos pieds. Une activité biologique abondante et diversifiée dans les sols est essentielle. Des organismes microscopiques aux vers de terre, la bioactivité des sols est responsable de fournir des nutriments aux plantes, de la lutte contre les maladies des plantes, de la protection du sol contre l’érosion et de nombreuses autres « tâches » agricoles. Par exemple, les vers de terre créent des tunnels qui contribuent à améliorer la circulation de l’air et de l’eau dans le sol. Les vers et les insectes recyclent les éléments nutritifs des tissus végétaux et du fumier animal en décomposition. Les bactéries rhizobiums capturent l’azote de l’air pour le diriger vers les légumineuses, ce qui donne à l’agriculteur un engrais gratuit. Les champignons mycorhiziens améliorent la capacité des plantes à absorber l’eau et les minéraux du sol.
La biodiversité des sols aide les agriculteurs et, en retour, les agriculteurs bio fournissent un habitat aux micro-organismes et autres créatures. Lorsque les agriculteurs épandent du compost ou plantent une culture de couverture, ils nourrissent la biodiversité des sols. Pour protéger la biodiversité, les agriculteurs peuvent maintenir le sol couvert, éviter de trop le travailler et éviter les engrais ou pesticides synthétiques.
Notes de bas de page:
[1] Systèmes de production biologique – Principes généraux et normes de gestion. CAN/CGSB-32.310-2015. Introduction. III. Pratiques biologiques. http://www.publications.gc.ca/site/fra/9.854644/publication.html
[2] Bot, Alexandra and José Benites. FAO Soils Bulletin 80. The importance of soil organic matter: Key to drought-resistant soil and sustained food production. Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture. 2005. http://www.fao.org/docrep/009/a0100e/a0100e00.htm [en anglais seulement]
[3] Systèmes de production biologique – Listes des substances permises. CAN/CGSB-32.311-2015. Tableau 4.2 – Amendements du sol et nutrition des cultures
[4] Systèmes de production biologique – Principes généraux et normes de gestion. CAN/CGSB-32.310-2015. 5.5.2.5